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Climat

Aux quatre coins du monde, déjà la fournaise

Le lac asséché de Hanna, dans la vallée d'Urak, au Pakistan, en 2018.

Alors que l’été n’a pas encore commencé, les phénomènes météorologiques extrêmes se multiplient dans le monde. Du Brésil aux Émirats arabes unis et à l’Iran, de l’ouest des États-Unis à la Sibérie, les températures sont déjà très élevées, menaçant la santé des populations, l’agriculture ou la production électrique.

En regardant sur une mappemonde les événements météorologiques extrêmes de ces derniers jours, on ne sait plus où donner de la tête : des records de chaleur au Moyen-Orient, des incendies en Sibérie, une incroyable sécheresse à l’ouest des États-Unis… Comme si les phénomènes intenses étaient hors de contrôle. Et ces événements sont évidemment à mettre en lien avec le bouleversement climatique. À cause de celui-ci, « il y a 90 % de risque qu’au moins une année entre 2021 et 2025 devienne la plus chaude jamais enregistrée, ce qui délogerait l’année 2016 du premier rang », a prévenu un bulletin de prévisions annuelles établi par le Service météorologique du Royaume-Uni (le centre principal de l’Organisation mondiale de météorologie), publié le 27 mai.

Alors que l’été n’a même pas encore commencé, les températures du Moyen-Orient ont flirté avec des chiffres record le 5 juin. Aux Émirats arabes unis, la ville de Sweihan (à l’est du pays) a enregistré une température de 51 °C. Le lendemain, le mercure a même atteint 51,8 °C. « Record absolu national de chaleur tous mois confondus égalé aux Émirats arabes unis. Le précédent record absolu de chaleur (tous mois confondus) pour cette station précise était de 51,3 °C le 2 juillet 2017 », a commenté sur Twitter Étienne Kapikian, prévisionniste à Météo France.

Le 5 juin, il a fait 51 °C à Omidiyeh, une ville à l’ouest de l’Iran, et 50,9 °C à Al Jahra, à l’est du Koweït. Toujours au-dessus de la barre des 50 °C, le Pakistan et Oman ont enregistré le même jour une température de 50,1 °C à Sibi (centre-ouest du pays) et Sunaynah (nord-ouest).

Habituellement, dans cette région, les pics de température ne sont atteints qu’en plein été. De telles vagues de chaleur dès le début du mois de juin laissent craindre une aggravation de la situation dans les semaines suivantes. « Les vagues de chaleur au cœur de l’été risquent d’être plus fréquentes et fortes, et de s’étendre dans la durée en rognant sur le printemps et l’automne », prédisait l’année dernière à Reporterre le prévisionniste de Météo France Emmanuel Demaël.

Record de température terrestre à plus de 80 °C

Au début du mois de mai, dans une étude parue dans le Bulletin of the American meteorological society, des chercheurs américains ont mis en lumière un nouveau record de température terrestre (et non atmosphérique) de 80,8 °C, constatée dans les déserts de Lout, en Iran, et de Sonora, au Mexique. « C’est 10 °C de plus que le précédent record de 70,7 °C observé en 2005 », précisaient les auteurs.

Les plus de 80,8 °C de température terrestre ont été constatés dans le désert de Lout, en Iran (photo), et dans le désert de Sonora (Mexique). Wikimedia Commons/CC-BY-4.0/Erik Albers

Une autre étude, publiée cette fois dans la revue Nature Climate Change le 31 mai [1], a montré que 37 % des décès liés à la chaleur pendant la saison chaude peuvent être attribués au changement climatique anthropique (provoqué par les êtres humains). « Nos résultats soutiennent le besoin urgent de stratégies d’atténuation et d’adaptation plus ambitieuses pour minimiser les impacts du changement climatique sur la santé publique », concluaient les chercheurs.

De façon moins impressionnante mais pourtant exceptionnelle, le thermomètre bat aussi des records dans d’autres régions du monde. Au Canada, le 6 juin, le mercure a atteint 31,4 °C dans le centre-ville de Montréal, avec un ressenti de 37 °C ! Un record a été enregistré dans la région de Gatineau (une ville de la province de Québec), avec une température de 33,2 °C. « L’ancien record pour un 6 juin était de 31,1 degrés, établi en 1930 », a indiqué au journal La Presse Anna-Belle Filion, météorologue pour le ministère Environnement canadien.

Sécheresses au Brésil et aux États-Unis

En Russie, des incendies ont commencé à se propager en Sibérie occidentale à partir de la mi-mai, la faute à un temps sec et venteux. D’après les autorités locales de la région de Tioumen, ces feux seraient les plus importants depuis dix ans. Mercredi 9 juin, la situation s’est calmée et le régime d’urgence a été levé dans quasiment toute la région… mais de gros incendies ont commencé simultanément en Yakoutie, dans le nord-est de la Sibérie.

Au Brésil, la sécheresse sévit aussi : d’après les agences du gouvernement, le défaut de pluies dans le sud-est et le centre-ouest du pays serait le pire depuis quatre-vingt-onze ans. La situation menace la production électrique du pays : le secteur hydroélectrique représente plus de la moitié de la production, et ses usines se trouvent dans les territoires concernés par la sécheresse. Il y a un également un risque pour les récoltes agricoles, ainsi qu’un risque d’incendie.

La sécheresse menace la production électrique du Brésil : le secteur hydroélectrique représente plus de la moitié de la production d’électricité du pays. Ici, le barrage d’Ilha Solteira, au centre-ouest du Brésil. Wikimedia Commons/CC-BY-3.0/Carlos Alves

L’ouest des États-Unis n’est pas en reste : lui aussi fait face à une grande sécheresse. La carte U.S. Drought Monitor indique qu’au 8 juin, la Californie, le Nevada, l’Arizona, l’Utah, le Nouveau-Mexique et le Colorado étaient dans une situation allant de « sécheresse modérée » à « sécheresse exceptionnelle » selon les territoires. Les températures augmentent, les sols sont secs, les risques d’incendie augmentent et l’eau se raréfie. Des restrictions d’eau ont d’ores et déjà été imposées aux États. Le lac Mead, bassin artificiel du Colorado, a atteint son plus faible niveau depuis sa création dans les années 1930, mercredi 9 juin. Son eau est pourtant cruciale pour la survie de l’agriculture dans cette région désertique...

Et la situation ne devrait pas s’améliorer de si tôt : d’après le Climate Prediction Center, la sécheresse devrait persister, et même s’étendre aux États voisins. « Les modèles prévisionnels évoquent à nouveau un potentiel de vague de chaleur majeure dans environ une semaine, a tweeté le 9 juin Daniel Swain, membre de l’Institut UCLA de l’environnement et de la durabilité. Des pistes opérationnelles font allusion à ce qui pourrait être un événement plutôt intense, avec des records de température mensuelle en juin, bien qu’il y ait des ensembles plus en sourdine. Cela reste un très fort signal de chaleur pour la mi-juin... »

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