Tweets, JPEG, vidéos… 3 questions pour comprendre le marché des NFT

Que signifient les trois lettres NFT, qui renvoient à l’expression « jeton non fongible », ou « non-fungible token » en anglais ? Comment ce nouveau marché fonctionne ? Pourquoi tout le monde en parle en ce moment ? Explications.

Tweets, JPEG, vidéos… 3 questions pour comprendre le marché des NFT
Meme populaire sur les réseaux sociaux © https://knowyourmeme.com/memes/stonks

Le 15 mars dernier, le milliardaire américain Elon Musk mettait en vente un morceau de musique dont la valeur dépasse actuellement le million de dollars. Sa particularité : il s’agit d’un extrait musical rendant hommage aux NFT… et qui est lui-même vendu sous la forme d’un NFT. Mais qu’est-ce qu’un NFT ? Comment ça fonctionne, et pourquoi tout le monde en parle en ce moment ? On vous dit tout sur ces trois petites lettres qui défraient la chronique depuis quelques semaines.

Un NFT, c’est quoi ?

Un NFT correspond à un certificat de propriété. Dit autrement, il s’agit d’un document attribuant la propriété d’un bien ou d’une œuvre à une personne. Sauf que l’on parle ici d’échanges « virtuels », c’est-à-dire qui se déroulent dans les univers numériques.

Les trois lettres de NFT correspondent à l’expression « jeton non fongible », ou « non-fungible token » en anglais. En français, le mot fongible renvoie aux choses « qui se consomment par l’usage et qui peuvent être remplacées par des choses de même nature, de même qualité et de même quantité, par exemple des denrées ou de l’argent comptant », d’après le dictionnaire Larousse. On imagine mal qu’une personne puisse exiger de son banquier qu’il lui restitue « les mêmes billets et les mêmes pièces de monnaie que ceux qu’il a versés lors de la constitution du dépôt correspondant », exemplifie le juriste Serge Braudo sur son blog.

À l’inverse, quelque chose de non fongible représente un actif unique, qui peut être physique ou numérique. Un NFT peut par exemple attester la propriété d’un dessin, d’une musique, d’un extrait vidéo ou même d’un tweet, comme nous le verrons un peu plus bas. Ce document est ensuite répertorié grâce à la technologie blockchain, considérée comme particulièrement sécurisée et directe. L’objet en question, qui prend le plus souvent la forme d’un fichier informatique, est échangé (revendu ou acquis) grâce à ce certificat. Et il répond à des lois mercantiles on ne peut plus basiques : plus ce certificat est rare, plus sa valeur économique sera généralement élevée. Son prix d’acquisition peut ainsi évoluer dans le temps. 

Comment ça fonctionne ?

Là où les NFT se distinguent des bitcoins, c’est qu’ils n’obéissent pas tout à fait aux mêmes règles. Car le bitcoin est une monnaie… certes virtuelle, mais une monnaie quand même : si le cours du bitcoin lui-même varie dans le temps, chaque bitcoin a la même valeur au même moment. C’est l’inverse pour les NFT, qui ne valent pas tous la même chose à un instant T, tout simplement parce qu’ils ne correspondent pas aux mêmes objets.

N’importe qui peut créer un NFT. Pour ce faire, il suffit de se rendre sur l’une des plateformes qui proposent ce genre de services, comme OpenSea, Rarible, Mintable ou Makersplace. Un guide vous expliquera alors comment télécharger votre fichier et le transformer en un NFT. « Pour réaliser l’opération, il faut verser des frais, souvent inférieurs à 30 dollars le fichier. Cette commission est à payer en crypto-monnaie, le plus souvent l’Ethereum, l’une des plus utilisées avec le bitcoin, précise Les Échos. Le créateur du NFT peut ensuite le vendre sur ces mêmes plateformes. » Et activer, s’il le souhaite, une fonctionnalité lui permettant de toucher un pourcentage à chaque fois que son NFT change de propriétaire.

Pourquoi tout le monde en parle ?

Parce que les prix grimpent autour de ce qui n’était, au départ, qu’un marché de niche. Le créateur de Twitter, Jack Dorsey, s’est vu proposer 2,5 millions de dollars pour le NFT de son tout premier tweet il y a quelques semaines. Mais il n’est pas seul. D’autres internautes ont déversé près de 390 000 dollars pour une vidéo de 50 secondes de la star américaine Grimes, 3 600 dollars pour un logo fantôme créé par la marque Gucci ou encore 290 000 dollars pour la « carte unique » de Cristiano Ronaldo dans le jeu vidéo de football Sorare.

Bien sûr, les NFT n’empêchent en aucun cas les autres internautes de profiter de ces objets, qui restent gratuitement à la disposition de tous sur le web. Mais comme le résume le média spécialisé The Verge, la valeur sociale attribuée au fait de posséder l’original prend ici le pas sur le reste : « C’est comme pour une collection d’art physique. Tout le monde peut acheter une estampe Monet, mais une seule personne peut posséder l’original. » Exemple particulièrement éloquent à cet égard : un collage numérique JPEG de dessins et d’animations réalisé durant 5 000 jours consécutifs par l’artiste Mike « Beeple » Winkelmann a été adjugé pour 69,3 millions de dollars par la maison d’enchères Christie’s le 11 mars dernier. C’est plus du double de la somme à laquelle avait été vendu un des célèbres Nymphéas du peintre Claude Monet en 2014 (27 millions de dollars).

À noter, enfin, que cette vente record a aussi mis le doigt sur une controverse grandissante autour des NFT : leur empreinte carbone. Quelques jours plus tôt, l’application dédiée aux arts numériques ArtStation avait notamment annulé le lancement d’une plateforme qu’elle souhaitait consacrer aux NFT après que certains artistes et activistes l’aient qualifié de « cauchemar » et d’« arnaque » environnementales, les marchés virtuels utilisés pour ce genre d’échanges étant extrêmement gourmands en énergie. Mike « Beeple » Winkelmann, de son côté, a promis que ses œuvres seraient désormais « neutres » ou « négatives  » en carbone.

et aussi, tout frais...